Départ pour le stage d'aguerrissement

Nous voila au jour J, jour du départ pour le delta de la Yazoo pour les quelques recrues participant de gré ou de force au stage d'aguerrissement militaire.

Le lieu du rendez-vous, à savoir le centre du fort de l'armée rebelle, était occupée, en cette heure très matinale (6h du matin), par "El Padre" et les paquetages pour les soldats; Le lieutenant Chavez était également présent, et discutait alors avec le vétéran de la caste des tigres.

Si le lieutenant Chavez avait une certaine présence, un charisme malgré son bras en écharpe, il n'avait l'air que d'un minus à côté du Padre. Imposant physiquement, le grand Afroaméricain aux cheveux ras et à la barbe soignée se tenait droit comme un I, bras croisés, écoutant ce qui devait être une anecdote amusante de la part de Chavez. Autour de son cou, on voyait fort bien le fameux collier aux 24 paires d'incisives de Traqueurs, symbole de ses excellentes aptitudes au combat contre ces vampires. Pas de doute, avec un tel personnage comme instructeur, les bleus allaient apprendre un max de choses pendant ce stage.

Chavez termina finalement son anecdote:

"Et donc voila... Du coup, n'hésitez pas à le houspiller un peu, ça lui fera pas de mal."

El Padre eut l'un de ses rires graves et sourds, et tapa dans le dos du lieutenant avant de répondre:

"Tu connais mes méthodes pédagogiques, Alvaro. En une semaine, j'en ferai de bons soldats, courageux et réfléchis."

"Je n'en doute même pas. Tiens, en voila qui arrivent."

Les 2 hommes se tournèrent synchroniquement vers le premier arrivant parmi les participants au stage.

(On parle de moi, là? )

The D Day...Dire que plusieurs décénies plus tôt, ce terme avait été utilisé pour désigner la plus grande opération militaire du siècle. C'était devenu une expression populaire, que Winters ne se gênait pas d'utiliser. Après tout, c'était le jour du départ pour ce foutu stage d'aguerissement. Pas qu'être jumelé avec les recrues l'emmerdait, ce qui lui foutait la mort dans l'âme, c'était de passer des jours avec El Padre, l'un des formateurs les moins commodes de l'univers...qui pourrait même probablement faire marcher au pas des Khurans endurcis. Ce stage, ce serait pas joyeux joyeux, surtout vu la zone...Pas le temps de déconner, hein...

Étant allé récupérer son paquetage à l'armurerie, il s'avança lentement, portant son sac par une seule bretelle, mains dans les poches. Il s'était débarassé de son inventaire, ne gardant que son couteau et son pistolet. En zone khurane, il préférait être le mieux armé possible. Il avait vérifié la vieille carabine qu'on lui avait confié. Elle était dans un état impeccable, pour une vieille arme. L'heure très matinale rendait le camps tranquille, très tranquille. Clope au bec, le soldat Winters arriva le premier au lieu de rendez-vous.

*Joie, je vais devoir me coltiner Chavez et le Tigre en attendant les autres.*

Hésitant à tourner les talons et à revenir dans 5 minutes, Jack arriva donc à l'emplacement du rendez-vous, le premier. Un peu endormit, il fit un salut militaire plutôt mou.

'Lut m'sieurs.

Il ne connaissait pas vraiment les nouvelles recrues. Il avait rencontré brièvement une garce associale, un black qui était partit avant même que Jack puisse lui parler, et Rivest, une jeune demoiselle plutôt introvertie. Il espérait fermement trouver au moins un ou deux gars un peu déjantés, qui aimaient jouer aux cartes et se compter des blagues le soir, avant d'aller faire son tour de garde. Plus il regardait le Padre, plus il se disait que le stage allait être lourd et déplaisant.

"... 'Lut, m'sieurs..."

Répéta El Padre en tournant la tête vers le lieutenant. Puis il rit légèrement, ça ressemblait plus à un "humhum" qu'à un "haha" franc et massif en fait.

En temps normal, ne pas appeler son supérieur par son grade, ça coûte très cher, et la punition est souvent simplement dégradante, la plupart du temps inutile, et surtout elle n'amène à rien. Le vétéran Tigre n'est pas le genre de gradé (oui, il est capitaine) à coller au trou à la moindre incartade, pas assez constructif.

"Quand on s'adresse à un supérieur, soldat, on précède son nom de son grade." Commença-t-il calmement, sans même avoir l'air de vouloir punir. "Tu vois ce sac, Winters?"

En parlant, El Padre avait indiqué du doigt le sac à dos à ses pieds.

"Il est rempli de 5 kg à peu près. Tu vas me le porter tout aujourd'hui, en plus de ton paquetage. Et tu ouvriras la marche. Comme ça, si tu traînasses, je serai derrière toi pour t'encourager, à coups de pieds au cul."

Pas à dire, il finirait par marcher droit, Jack, d'ici à la fin du stage. Avec un prof pareil, en même temps... Soit on apprend vite, soit on accumule ce genre de petits défis physiques; bien que là, le défi soit assez léger, il avait fait faire bien pire à d'autres récalcitrants.

Ainsi la punition n'était pas dégradante (il y a pire que porter un sac de plus) ni inutile (ça ferait les muscles à ce cher Jack), ainsi que sont toutes les punitions du Padre. D'autant plus que là, on n'était pas encore parti; en territoire hostile, les punitions sont moins fréquentes, car il faut d'abord songer à sa survie.

"Les autres ne devraient plus tarder."

Dit Chavez, rayant le nom de Jack de sa liste d'invités. Mais il était quand même assez perplexe. N'avait-on pas donné aux recrues l'heure exacte du départ? C'était étonnant de n'en avoir qu'un de présent à l'avance, alors qu'on en attendait 4 ou 5.

"La patience est une qualité à avoir, Lieutenant, surtout là où on va. Attendons encore un peu."

Quoi? Ne pas être en avance?
Non pas que Leonora n'avait pas l'habitude de se lever tôt et d'être parfaitement fonctionnelle avec peu d'heures de sommeil, mais se matin, en se levant, elle avait décidé de s'éloigner légèrement du camp histoire de se retrouver un peu seule et d'accorder au Père et aux défunts une brève prière avant de partir. Ceci expliqua pourquoi elle s'égara un peu dans son propre esprit avant de se rendre compte qu'elle n'était toujours pas passée prendre son sac contenant les effets qu'on leur avait préparer pour le temps du dit stage. Enfin, pour faire plus simple, une fois avoir pris le temps de revêtir une tenue plus règlementaire, la jeune femme finit par arriver au lieux de rendez-vous avec juste un peu d'avance. C'était déjà assez pour faire preuve de respect, mais pas suffisamment pour démontrer un enthousiasme qui était, pour être honnête, seulement plus ou moins présent.

Trois hommes étaient présents: Winters, qu'elle avait déjà rencontré précédemment et qui avait donné une impression relativement bonne (pour le peu qu'elle avait vu, comment bien juger?), et deux autres qu'elle n'avait encore jamais vu. Bon, si on se fiait à la logique, l'une des deux personnes présentes devait être "El Padre", vraisemblablement celui avec le collier de dents de... Non, elle ne rêvait pas, c'était bel et bien des dents de traqueurs!! Enfin, pour l'autre... néant, aucune idée, mais il y avait fort à parier qu'il n'avait rien d'une nouvelle recrue. Bon, avec des militaires, il faut savoir montrer du respect... ce n'avait jamais été un problème pour Leonora, toutefois, même avec les observations des derniers temps passés dans le camps, on ne pouvait pas dire pour autant qu'elle connaissait très bien le protocole militaire et tout ce qui va avec... Enfin, il allait falloir vivre avec ça tient, pas trop le choix.

"Bonjour Winters," fit-elle simplement en direction du soldat avant de poser son regard vers El Padre, "capitaine," (oui oui, elle a fait ses devoirs) un léger signe de tête, juste assez polis et sérieux qu'à son habitude, "..."

Non pas qu'elle ne voulait rien dire. En fait, en portant son attention sur la troisième personne présente, elle s'était apprêté à dire quelque chose... puis s'était ravisé. Mieux valait se contenter d'un simple signe de tête en ne sachant pas à qui on a affaire.

"Désolé, je suis un peu juste..."

Peut-être aurait-il mieux valu se la fermer... Avec un peu de chance, cela n'ouvrira pas la porte à l'une de ces fameuses situations gênante où, quoiqu'on dise ou qu'on fasse, on ne peut que s'enfoncer d'avantage. Ça part bien... (sarcasme???)